Le navire


 

Même si de grandes tendances se dégagent, le matériel naval employé diffère selon les ports. Ainsi il n'y a pas de navire de course type pour plusieurs raisons.

  • En temps de guerre c'était l'ensemble du territoire qui était mobilisé. On comprend donc que Marseille, Bordeaux, Saint-Malo ou Dunkerque aient développé des façons différentes d'appréhender la guerre de course.
  • La course elle même présentait des visages différents. En effet quoi de commun entre la petite course côtière et la véritable course d'escadre.
  • La guerre de course a traversé les siècles et il est normal que les bâtiments évoluent, ne serait ce que par le simple progrès technique.
  • Il parait donc plus pertinent de s'intéresser au matériel naval à travers l'exemple de Saint-malo, brillamment étudié par A.Lespagnol

 

Le bateau devait répondre à des impératifs techniques et géographiques


Le but de la course était de s'emparer par la force, ou par la menace de la force de navires ennemis. Cet objectif introduisait donc certaines contraintes :

Le navire devait être munis d'un armement conséquent en artillerie et en armes légères, avec poudre et munitions.

Il devait être rapide et pouvoir chasser et rattraper les navires marchands ennemis et éventuellement semer un vaisseau de guerre ennemi.

L'équipage devait être numériquement important pour pouvoir assurer un abordage de qualité et pouvoir assurer la prise de possession et la conduite à bon bord du navire capturé.

 

Entre reconversions et solutions nouvelles


La première des solutions utilisée par les négociants armateurs malouins fut la reconversion de certains de leurs navires utilisés jusque là dans des trafics marchands dont l'activité de la guerre remettait en cause. Certaines de ses frégates reconverties ont obtenus de brillants succès tel Le Grénédan (morutier de 300 tonneaux construit en 1682) qui permit au grand armateur malouin Noel Danycan d'enregistrer ses premiers succès. Cette reconversion semblaient d'autant plus facile que les navires étaient déjà munis d'une artillerie importante et qu'ils possédaient de réelles qualités voilières.

Bref cette solution était commode rapide et économique puisque la plupart des navires étaient déjà amortis.

Mais au fil du temps et des combats, ce modèle de reconversion montra des limites : la faiblesse de l'armement, le manque de vitesse et l'âge du bateau occasionnèrent de nombreuses pertes. La nécessité de développer un matériel naval spécifique devenait impérieuse pour s'adapter à la fois à la petite course côtière dans les eaux britanniques et à la grande course océanique.

La réponse à la nouvelle donne stratégico-navale fut graduée. Des bâtiments de faible tonnage (moins de 100 tonneaux) furent d'abord construits, puis des frégates légères de 120-180 tonneaux spécialement étudiés pour la course. Les frégates sont fines, maniables, capable de franchir des bas-fonds sans encombre, de prendre en chasse de lourds navires marchands et de s'enfuir comme elles sont venues au gré du vent...

Les armateurs malouins ont ensuite décidé de se lancer dans la construction aux prix d'efforts financiers considérables, de grosses frégates de 300 à 400 tonneaux munies de 30 à 50 canons. Cette nouvelle orientation répondaient à la volonté de se lancer notamment dans une course plus ambitieuse.

La course elle même a contribué a alimenter l'armement corsaire grâce aux prises réutilisées. En effet de nombreux corsaires et vaisseaux de guerre ennemis capturés furent réarmer, permettant ainsi aux armateurs de disposer d'un matériel de tout premier ordre et à moindre coût.

Mais cette solution ne pouvait être suffisante d'un point de vue quantitatif. Il restait alors une dernière solution aux armateurs pour développer leurs flottilles : solliciter le prêt de navires appartenant au Roy. Les avantages économiques qu'occasionnait étaient énormes dans la mesure où l'Etat prenait tout en charge. Ainsi le navire prêté était livré aux armateurs armés, carennés et apprêtés à l'appareillage. Le roi devait en échange sur le produit brut des prises (1/5 jusqu'au début du XVIIIème).

Les armateurs malouins ont donc eu recours à de nombreux expédients pour renouveler, développer et améliorer leur flottille. Cela témoigne de la vitalité et de la capacité de Saint-Malo qui prit sous Louis XIV le leadership de l'armement à la course.